• L'intérêt manifesté par le surréalisme pour l'inconsient s'exprime dans des poèmes lyriques et intimistes. Dans Capitale de la douleur, Paul Eluard évoque une vie sentimentale douloureuse.  

    Capitale de la douleur

    Les yeux toujours purs

    Jours de lenteur, jours de pluie,
    Jours de miroirs brisés et d'aiguilles perdues,
    Jours de paupières closes à l'horizon des mers,
    D'heures toutes semblables, jours de captivité,

    Mon esprit qui brillait encore sur les feuilles
    Et les fleurs, mon esprit est nu comme l'amour,
    L'aurore qu'il oublie lui fait baisser la tête
    Et contempler son corps obéissant et vain.

    Pourtant j'ai vu les plus beaux yeux du monde,
    Dieux d'argent qui tenaient des saphirs dans leurs mains,
    De véritables dieux, des oiseaux dans la terre
    Et dans l'eau, je les ai vus.

    Leurs ailes sont les miennes, rien n'existe
    Que leur vol qui secoue ma misère,
    Leur vol d'étoile et de lumière
    Leur vol de terre, leur vol de pierre
    Sur les flots de leurs ailes,

    Ma pensée soutenue par la vie et la mort.

                                                        Paul Eluard


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  • En fait un texte par jour c'est un peu beaucoup, déjà pour moi à trouver, et en plus ce blog deviendrait vite trop grand et trop lourd!
    Un texte sur la guerre et l'espérance ... un monde où la haine devient la seule lumière ... horrible non?

    L'Honneur des poètes

    Les dents serrées

    Je hais. Ne me demandez pas ce que je hais
    Il y a des mondes de mutisme entre les hommes
    et le ciel veule sur l'abîme, et le mépris
    des morts. Il y a des mots entrechoqués, des lèvres

    sans visage, se parjurant dans les ténèbres
    il y a l'air prostitué au mensonge, et la Voix
    souillant jusqu'au secret de l'âme
                                  mais il y a
    le feu sanglant, la soif rageuse d'être libre
    il y a des millions de sourds les dents serrées
    il y a le sang qui commence à peine à couler
    il y a la haine et c'est assez pour espérer.

                                                          Pierre Emmanuel 

    (une ptite note de vocabulaire pour ceux qui ne lisent pas beaucoup : veule : qui manque d'énergie, mou)

    voilà, les textes c'est fait pour rêver, mais c'est aussi fait pour crier, crier sa haine et la douleur qu'il y a en nous.


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  • Au rendez vous pour le texte du jour ... faudra que j'ai le temps de faire ça chaque soir!!! et surtout que je trouve un texte par jour ... ça ne devrais pas trop être difficile vu les richesses de textes qu'on a sur cette terre, l'homme ne fais pas que des choses bien, mais au moins il sait utiliser sa plus belle invention... l'écriture!!!

    Gaspard de la nuit

    Ondine

        -"Ecoute! - Ecoute! - C'est moi, c'est Ondine qui frôle de ces gouttes d'eau les losanges sonores de ta fenêtre illuminée par les mornes rayons de la lune ; et voici, en robe de moire, la dame châtelaine qui contemple à son balcon la belle nuit étoilée et le beau lac endormi. 

        "Chaque flot est un ondin qui nage dans le courant, chaque courant est un sentier qui serpente vers mon palais, et mon palais est bâti fluide, au fond du lac, dans le triangle du feu, de la terre et de l'air.

        "Ecoute! - Ecoute! - Mon père bat l'eau coassante d'une branche d'aulne verte, et mes soeurs caressent de leurs bras d'écume les fraîches îles d'herbes, de nénuphars et de glaïeuls, ou se moquent du saule caduc et barbu qui pêche à la ligne!"
                                                                                 *
        Sa chanson murmurée, elle me supplia de recevoir son anneau à mon doigt pour être l'époux d'une Ondine, et de visiter avec elle son palais pour être le roi des lacs.

        Et comme je lui répondais qui j'aimais une mortelle, boudeuse et dépitée, elle pleura quelques larmes, poussa un éclat de rire, et s'évanouit en giboulées qui ruisselèrent blanches les long de mes vitraux bleus.

    (pour la culture, un peu de vocabulaire!!
    Ondine, au masculin ondin : génie des eaux et de la mythologie germanique
    Moire : étoffe à reflets chageants
    Aulne : arbre du bord des eaux)


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  • Un ptit passage issu de "Pauline" de Dumas concernant la musique.

       
    Jamais l'habile artiste n'avait poussé si haut les merveilles de son exécution, ou peut être jamais ne m'étais-je trouvée dans une disposition d'esprit aussi parfaitement apte à sentir cette composition si mélancolique et si passionnée; il me sembla que c'était la première fois que j'entendais supplier, gémir et se briser l'âme souffrante dont l'auteur du Freyschütz a exhalé les soupirs dans ses mélodies. Tout ce que la musique, cette langue des anges, a d'accents, d'espoir, de tristesse et de douleur semblait s'être réuni dans ce morceau, dont les variations, improvisées selon les inspirations du traducteur, arrivaient à la suite du motif comme des notes explicatives.


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  • Tout le monde, dès que l'on parle de Chateaubriand, réagi "c'est pourri" ... non mais de quel droit? Chateaubriand écrit très bien ... la preuve avec ce passage de "René" qui est absolument magnifique! On ne juge pas sur le nom ou les apparences ... vous avez oublié?

    L'excès même du sacrifice, à présent que le sacrifice est consommé, sert à me rendre quelque paix. La simplicité de mes compagnes, la pureté de leurs voeux, la régularité de leur vie, tout répand du beaume sur mes jours. Quand j'entends gronder les orages, et que l'oiseau de mer vient battre des ailes à ma fenêtre, moi, pauvre colombe du ciel, je songe au bonheur que j'ai eu de trouver un abri contre la tempête. C'est ici la sainte montagne, le sommet élevé d'où l'on entend les derniers bruits de la terre, et les premiers concerts du ciel; c'est ici que la religion trompe doucement une âme sensible : aux plus violentes amours elle substitue une sorte de chasteté brûlante où l'amante et la vierge sont unies; elle épure les soupirs; elle change en une flamme incorruptible une flamme périssable; elle mêle divinement son calme et son innocence à ce reste de trouble et de volupté d'un coeur qui cherche à se reposer, et d'une vie qui se retire.

    enfin après...chacun ses goûts...


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